Les enfants sont bruyants !
“Chut” est un mot que je souhaiterais utiliser avec plus d’attention quand je suis auprès d’enfants. On demande de manière quasi instantanée aux enfants d’être silencieux mais j’aimerais bien réfléchir sérieusement à cette question et que l’on prenne plus le temps de choisir les moments où le silence est bien nécessaire.
J’ai l’impression que l’on demande aux enfants tout un tas d’éléments afin de réajuster ce qui font justement d’eux des enfants. “Se tenir bien”, “écouter les adultes”, “ne pas courir” : ce sont des règles que nous avons, je pense, tous.tes entendues et auxquelles nous avons dû nous plier. Je n’insinue pas que ces règles soient définitivement à effacer, mais simplement j’aspire à ce que nous mettions un sens, à chaque fois, derrière les demandes, voir les obligations que nous imposons aux enfants. Et dernièrement, c’est sur cette demande de silence que j’ai souhaité me pencher. Pourquoi je demande aux enfants de faire moins de bruit ?
Alors souvent je le fais car j’ai une consigne à leur faire passer, une information importante à leur donner, parce qu’un.e de leur camarade prend la parole, etc… Mais parfois, en pleine activité, alors qu’aucun silence n’est requis, je me vois tenter de dire “chut”, s’il n’est pas déjà sorti spontanément..
Alors oui, le bruit peut-être un vrai souci lorsque cela perturbe notre concentration ou dans le cas de sensibilité particulière à celui-ci. Mais parfois, je me rends compte que c’est simplement ma patience qui est mise à l’épreuve. Je constate que c’est l’intégration de toutes ces années à avoir entendu des adultes demander un silence royal dans n’importe quelle situation qui me guide. Parce qu’un enfant, ça n’a pas le droit d’être bruyant.
C’est une anecdote récente que l’on m’a raconté qui m’a donné envie d’écrire à ce sujet : “Dans un groupe, sur un temps de goûter, un enfant est venu me demander s’il pouvait raconter une blague. J’ai demandé aux autres enfants de prêter attention à leur camarade. La devinette a mobilisé tous ces petits cerveaux, et bientôt c’est une dizaine d’enfants qui avait mille blagues à raconter. Une vraie session de stand-up s’était mise en place et tout le monde se prêtait au jeu avec entrain. Évidemment, du stand-up, ce n’est pas silencieux, et le bruit faisait partie de l’amusement. Seulement, mon collègue qui n’avait rien vu et arrivait en cours de route a perçu, à ses yeux, un vrai bazar! Sans même me concerter, je l’ai entendu hausser le ton “Mais ça va pas, vous faites beaucoup trop de bruit, je vous entendais du couloir, vous baissez d’un ton …[etc]” Ce petit groupe a dû se taire, cesser ce qui les faisait tant rire, tout en devant comprendre que ce qui les a amusé pendant de longues minutes, était un mauvais comportement”.
Cela fait quelque temps que désormais, lorsque ce “chut” s’apprête à sortir, je me pose un peu pour les regarder, ces enfants bruyants, et me demander si ce bruit met en péril quoi que ce soit de si important. Y’a t-il une vraie raison valable de leur demander de se restreindre (au risque que cela ne fonctionne même pas, que l’on se fatigue, que l’on rentre en conflit) ? Si je ne trouve pas de raison valable autre que ma patience et l’idée trop ancrée de devoir avoir le silence sans justification, alors je les laisse être bruyants, être des enfants.